Je voudrais pouvoir te raconter une belle histoire mon ptit bout. Te raconter le Petit Poucet et Peter Pan. Te dire que la vie est belle. Te faire de beaux sourires. Mais voir que tes yeux à toi ne sont pas dupes. Toi tu sais. Tu es le seul. Le seul à voir au-dessus de mes sourires. Le seul à savoir que mes yeux ne sourient pas. Qu’ils pleurent. Alors, je ne sais pas si l’histoire que je vais te raconter va être jolie. Je ne sais pas si elle a une belle fin. J’ignore si la princesse épousera son prince charmant. Mais, je vais te la raconter cette histoire en te regardant droit dans les yeux. En m’asseyant au bord de ton lit et en te caressant les cheveux. Tu m’écoutes bien mon ptit bout. Tes yeux ont accroché les miens.

Il était une fois… Non. C’est réservé au conte de fée. Et l’histoire que je vais te raconter n’en est pas un. Le temps des princesses et des sorcières est assez loin ce soir. Ce soir, c’est entre toi et moi. Entre nous et le reste du monde. Je vais te parler du reste du monde mon ptit bout. Vu que tu me poses tellement de questions. Je vais te dire moi ce que c’est le monde. Je vais répondre à tes questions. Si nombreuses soient-elles. Tu ne sauras pas tout ce soir. Ni demain. Ni après. Mais, je vais essayer de te dire le plus de choses possibles. Tu m’écoutes bien mon ptit bout. Tu te demandes quand je vais commencer. N’est-ce pas ? Mais vois-tu, je ne sais pas par où je dois commencer. Comment fait-on mon ptit bout alors ?

Oui. C’est cela. Pose-moi cette question. La question qui te brûle les lèvres. Celle qui te tient le plus à cœur. C’est à mon tour maintenant de t’écouter. Je t’écoute bien mon ptit bout. Mes yeux sont accrochés à tes lèvres. Pourquoi suis-je triste ? C’est cette question qui te tracasse ? Je voudrais te dire que je ne suis pas triste. Tu te trompe. Pourquoi serais-je triste moi ? Mais je n’y arrive pas. Je ne peux pas le faire en te regardant droit dans les yeux. Je ne peux pas puisque tu le sais. Tu sais que je suis triste et tu veux savoir pourquoi. Je devrais te répondre que çà ne te regarde pas. Mais tu me prends la main mon ptit bout. Ta petite main qui serre la mienne fort. Très fort. Ta petite main que je sens au creux de la mienne. Cette petite main qui me dit que tu es là. Que tu es là pour moi. Et que tu seras toujours là. Parce que je m’accroche à toi désespérément.

Mais çà tu le sais. J’ai besoin de toi. Je ne veux pas que tu t’en ailles mon ptit bout. Et je te souris à toi. Oui, à toi petite fille boudeuse et caractérielle. Oui, toi avec ton sourire en coin, tes yeux rieurs et tes deux tresses. Je te souris à toi qui aime donner des ordres. Je te souris à toi petite fille câline. Mais, tu es têtue aussi. Je n’arriverai pas à changer de conversation, n’est-ce pas ? Cependant petite fille, tu sais pourquoi je suis triste. Mon cœur t’est ouvert. Tu lis en moi comme personne ne le peut. Pourquoi mon ptit bout ?

C’est vrai. Toi tu l’ignores encore. Mais parce que mon ptit bout. Je suis toi. Moi aussi j’étais une petite fille boudeuse et caractérielle. Moi aussi ma maman me faisait de belles tresses pour aller à l’école. Je faisais plein de câlins. Je faisais tout comme toi mon ptit bout. Tu ne me crois pas n’est-ce pas ? Tu ne veux pas. Je te comprends. Moi aussi quand j’étais toi, je croyais que le monde était rose. Que quand je serais grande tout serait super. Mais j’ai été déçue. Mes illusions d’enfant se sont évaporées. Alors je vais te dire moi ce qu’est le monde mon ptit bout. Non. Tu ne veux pas savoir. Pourquoi ?

Tu as raison. Je ne te dirais rien. Tu resteras toujours une petite fille. Alors, je vais abandonner mon histoire. Et je vais te raconter un beau conte de fée. Tu ne grandiras pas. Je ne le veux pas. Toi non plus ? Çà tombe plutôt bien. Alors mon ptit bout, quelle histoire veux-tu ? Cendrillon. Tu es sûre ? Tu la connais par cœur cette histoire ! Oui. Tu es sûre. Très bien. Rallonge-toi mon ptit bout. Ma main n’a pas quitté la tienne. Je commence. Tu m’écoutes bien mon ptit bout.

Il était une fois...

Tu t’es endormie mon ptit bout. L’histoire n’est pas encore finie mais déjà tes yeux sont clos. Tu souris. Ta main est toujours dans la mienne. Tu es heureuse mon ptit bout. Tu vas faire de beaux rêves cette nuit. Tu vas rêver être une princesse avec de belles robes. Je le sais mon ptit bout. J’ai fait les mêmes rêves. A vrai dire, je les fais toujours. Je crois bien.